DES ILLUSIONS - DÉSILLUSIONS
L’écriture, d'abord.
Ce travail débute par la découverte d’un témoignage, d’un fait réel. C’est la base, le matériaux brut, qui active mystérieusement une émotion viscérale, une question, à ce stade encore floue et nébuleuse. S’ensuit un long processus de gestation de cette confidence sans jugement, un travail dramaturgique : une culture de rencontres diverses, un éclatement des points de vue, une récolte à vif pour entendre les échos du monde autour des multiples questions soulevées par ce premier fait. Qu’il s’agisse de : "Comment dire « je » lorsqu’on est atteint d’un trouble dissociatif de l’identité ? » Ou encore « Ai-je le droit de ne pas imposer ma condition de malade à mon entourage? ». Le réel tend la main et montre la voie, la fiction, matrice en mouvement, s’attache à rendre compte dans l’illusion de ces explorations, silences observateurs et rencontres.
Ensuite, la mise en scène.
L’illusion du réel ne peut alors qu’exister qu’avec la complicité de celui qui regarde, le spectateur. L’affect de la désillusion avec lequel j’aime jouer dans la mise en scène n’est que projection de nos craintes les plus intimes : et si c’était vrai? Un illusion lucide menant aux doutes, aux questions. C’est tout l’enjeu de la mise en scène, rendre vivante aux spectateurs une expérience contradictoire : ce qu’il voit n’est pas vrai, ce qu’ils vivent n’en est pas moins vrai. Et s’atteler ensuite à ce que ne disparaisse pas ce sentiment, cette réflexion : en leur donnant à voir ce qui n’est pas écrit, en leur laissant combler les silences, en chevauchant paroles, métaphores, corps parlant et réalisme. En cherchant avant tout à leur faire ressentir et voir, ce réel désormais distendu et éclaté.